L’Intelligence Situationnelle pour agir dans un monde incertain

 
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Quand on parlait d’intelligence, longtemps il n’y eut que le Quotient Intellectuel fondé sur la logique, le rationnel. Puis vint en complément, l’Intelligence Emotionnelle qui donna toute sa place à la gestion des émotions… Importance du cerveau gauche ET du cerveau droit.

C’était négliger une 3e forme d’intelligence : l’Intelligence Situationnelle qui est vieille… comme la Grèce antique puisqu’elle puise son origine dans la déesse Métis, personnification de la sagesse et de l’intelligence rusée.
C’est cette intelligence que nous voyons en action quand nous nous exclamons : « c’est malin » ; « c’est habile » ; « c’est futé »… ! Un de mes professeurs de sociologie utilisait très souvent l’expression « c’est sioux » pour saluer l’habileté, la finesse d’une solution proposée !

Il s’agit d’un ensemble complexe d’attitudes mentales, de comportements intellectuels qui combinent le flair, la sagacité, la prévision, la souplesse d’esprit, la débrouillardise, l’attention vigilante, la prudence avisée, le sens de l’opportunité. Une forme d'intelligence engagée dans l'action, pratique et orientée vers le succès, qui est le fruit d’une expérience longuement acquise.
Paradoxalement, de jeunes héros en sont l’incarnation dans la tradition populaire : Robin des Bois qui déjoue les pièges, en tirant parti de son environnement, la forêt ; Zorro (renard en espagnol !) qui jongle d’une apparence à l’autre, avec opportunité, pour servir sa cause.

A quoi sert-elle ?
A comprendre une situation dans ses différentes dimensions et sa complexité, pour s’y adapter et apporter une réponse appropriée.

L’intelligence situationnelle nous permet d’être centrés sur notre environnement, en ouverture perceptive, en porosité avec notre écosystème. Grâce à cette orientation vers l’extérieur, nous pouvons capter les signaux faibles, « matière première » de cette forme d’intelligence. En effet, l’intelligence rationnelle part de la collecte des faits, l’intelligence émotionnelle de l’identification des émotions et l’intelligence émotionnelle, elle, se nourrit des signaux faibles.

Son efficacité réside dans notre rapidité à passer de ces signaux faibles à une action adaptée, par un processus très intuitif. Gerd Gigerenzer qualifie l’intuition de « forme d’intelligence inconsciente qui repose sur de nombreuses années d’expérience ». Quand on vous interroge « Pourquoi as-tu agi de la sorte ? », la réponse est souvent « J’ai senti que c’était comme cela qu’il fallait faire ».

Elle permet donc d’oser agir sans tout savoir, faire avec ce que l’on sait, en mobilisant une « analyse flash » qui ne passe pas par une démarche rationnelle fondée sur le QI. Cette aptitude relève à la fois du stratégique (vision globale) et de l’opérationnel (action) avec la combinaison de l'expérience et de la vigilance.

Pourquoi est-elle d’actualité ?
Elle est particulièrement utile quand les situations sont incertaines, instables, ambiguës, imprévisibles, voire extrêmes, et exigent une action immédiate… C’est le monde VICA, dans lequel nous vivons depuis quelques années, récemment exacerbé par la crise du Coronavirus.

Aujourd’hui, les dirigeants, les managers prennent des décisions dans un monde global, interconnecté et qui évolue à très grande vitesse. Ils se trouvent confrontés à des problèmes nouveaux en permanence, que l’intelligence situationnelle aide à résoudre. En effet, elle permet de ne pas subir les aléas, les revirements, les imprévus, et d’agir.

Il est donc crucial de développer leur intelligence situationnelle.
Notamment en les rendant attentifs à leur environnement, à l’écoute de leur écosystème. Ils restent souvent essentiellement centrés sur le business et les équipes, en occultant ce qui les entourent.
Notamment en les familiarisant avec l’incertitude afin qu’ils intègrent la différence entre risque et incertitude. L’analyse des risques est très répandue en entreprise et est inopérante dans un monde incertain.
Notamment en les aidant à abandonner leurs pratiques de planification pour la méthode des scenarios.

L’intelligence situationnelle, l’intelligence de l’incertitude !

 

 

Gerd Gigerenzer – La certitude est une illusion dont nous devons nous défaire – Philonomist